Laissez naître et laissez être

agir spirituel bâtir une conscience collective et une culture saine comprendre les enjeux de notre époque Jan 17, 2022
 
Ce matin, en lisant ce cri du cœur, fort, noble et authentique, les mots qui étaient étouffés dans ma poitrine depuis presque deux ans de douleurs et de lourdeurs se sont dénoués ne serait-ce que très modestement, et j'aimerais partager à mon tour ces quelques lignes, non pas pour appeler à la pitié ou la solidarité, mais simplement pour s’exprimer.
 
Je vous invite à lire le texte qui m’a inspiré avant de me lire, si vous le souhaitez. Je partage simplement ce qu’il dit à ses frères.
 
Je peux dire autant de mes “frères” ou sœurs qui œuvrent dans l’entreprise de “l’invitation à Dieu” ou “l’invitation à l’Islam” sans qu’ils ne prennent la peine de s’arrêter un moment sur la signification de ce qu’est l’invitation, sa manière, ses éthiques et sa raison d’être; de ce qu'est leur raison d’être et le rôle qui est attendu d’eux comme instruments de la Paix Divine, comme compagnons de route ou comme frères accompagnateurs; sur ce qu'est “l’islam” et qui est ce Dieu, dieu ou ces faux dieux à qui ils invitent… On sait bien que les gens n'adorent plus des statues de nos jours, en revanche, on doit se battre contre les " faux dieux" qui nous réclament, nous accaparent et exigent qu'on les satisfasse. Par faux dieux, je fais référence à  tout ce que l'être humain peut mettre à la place de Dieu, tout ce qu'il peut "adorer", craindre ou placer au centre de son existence, tout ce à quoi il peut donner l'intérêt qu'il devrait donner à Dieu dans son cœur à la Place du Dieu Unique, Vrai et Vivant. Ainsi, certaines idées, et aussi certaines alliances sont malheureusement devenues semblables aux statues qu'adoraient les polythéistes anciennement.  
 
J’ai beaucoup reçu d’attaques et de coups de matraques et j’ai le cœur qui saigne de ma séparation de plusieurs bien-aimés qui se sont éloignés, intimidés par le bruit détracteur qui parfois devient plus fort que nos appels d’amour et nos cris de douleurs… Mais je n’ai jamais trouvé la force ou le courage de dire à ces frères adversaires : assez !
 
Aujourd’hui, ce frère dans le réel, dans l’expérience du spirituel et dans l’invitation au Réel Éternel, ce frère de nage à contre-courants, d’amour et de souffrance m’inspire... Oui, je dis bien ce frère, au-delà des “identités”, cadres ou contextes qui nous séparent. Je m’identifie très bien à son expérience. Je me retrouve en lui dans sa souffrance, et dans sa sous-France. Si tu me demandes, je ne sens même pas une différence d’identité, et je ne la vois pas. Comme je le dis souvent, si nous sommes tous fils d’Adam par notre origine, nous sommes tous “enfants d'Israël*" sur le terrain du projet de concrétisation et mise à l’épreuve de notre réalité humaine adamique.
 
Et dans cette expérience qu’il a avec ses “frères”, qui me rappelle l’expérience que j’ai avec mes “frères”, comme je songe au songe de Joseph, et au moment de réunion des frères après avoir retrouvé et reconnu leur “frère” … (Sourate Youssef 12 - versets 90-92). Méditons, mes frères : il a fallu que les frères de Joseph rentrent par des portes différentes, qu’ils se séparent, pour se retrouver devant leur frère et qu’ils le reconnaissent de nouveau comme tel… Il a fallu que chacun revienne à lui-même et fasse sa route vers la vérité, la fraternité et l’amour de Joseph de manière humble et authentique, seul et libéré du poids de la masse collective tyrannique et inconsciente des “frères alliés” … Il a fallu qu’ils retrouvent leurs cœurs, leurs raisons et raisons d’être avant… Ça a pris ce que ça a pris, les plus belles des années du Prophète Jacob, des larmes de sang, de l’esclavage, de la prison et beaucoup de peine pour Joseph mais “la fin” était belle…
 
Ce n’était pourtant que la fin de cet épisode de l’histoire de ces douze frères… l’histoire réelle ne cesse de recommencer et de recommencer là où il y’a des “frères” qui rejettent leurs cœurs, perdent leur raison, se laissent aveugler par leur ego et oublient leur raison d’être… Tantôt à Fès tantôt à Meknès… En même temps, à plusieurs endroits et dans des cadres “religieux” ou culturels différents, l’histoire est vivante, l’histoire continue… Depuis les deux premiers frères sur terre jusqu’aux derniers, ces scènes douloureuses ne cessent de se dérouler… les potentialités ou manifestations sont multiples et la réalité n’est qu’une en effet… C’est toujours la même plaie vivante qui saigne… Cette plaie : j’en saigne et grâce à elle j’enseigne…
 
Bonne nouvelle à ces “frères” qui veulent étouffer notre petite voix et qui auraient pensé que sous les coups de leurs langues et “claviers” matraques, à force d’en saigner on perdra l’énergie et le goût d’enseigner… Espérez aussi longtemps et faites ce que vous voulez. Si c’était notre petit projet on l’aurait arrêté depuis longtemps mais ceci est bel et bien un projet et une grâce qui nous dépasse. Si c’était notre petite histoire et notre petite vie, on l’aurait finie depuis des années mais il s’agit de l’histoire et de la vie de l’Eternel... Et dans cette histoire vous n’allez jouer que le rôle qui vous a été suggéré et que vous avez eu le malheur (ou le bonheur) de choisir. Applaudissez aujourd’hui et maudissez demain, maudissez aujourd’hui et applaudissez demain, maudissez toute votre vie et applaudissez au dernier moment, applaudissez toute votre vie et maudissez au dernier instant… Applaudissez pour quelques jours et maudissez pour le restant de vos jours si vous voulez… faites ce que vous voulez, je vous ai tourné le dos tous, bienvenue à vos tapes comme vos poignards. Sachez bien que tous ces rôles, tous ces personnages et toutes ces postures et bien plus sont disponibles dans notre histoire. Choisissez ce que vous voulez. Vous allez être responsable pour votre choix certes mais en ce qui nous concerne vous ne pouvez rien avancer ni retarder. Dans cette affaire vous n’avez rien à faire.
 
Le contexte qui nous fut destiné et écrit par la main du Maître Savant est déjà écrit avec ses peines, tests, épreuves et conflits. À vous de choisir d’être la main qui nous frappe ou la main qui nous est tendue, mais les deux postures ont été déjà été destinées dans notre histoire. Il a été écrit que nous rencontrions des amis qui nous aident comme des ennemis qui bloquent notre chemin. Lorsque vous rentrez dans notre vie, vous ne rentrez que par la porte du destin, de cette potentialité qui fut déjà écrite. Vous pouvez choisir la porte par laquelle vous rentrez dans notre vie et vous serez responsable de votre choix, par contre la porte est déjà là. Vous ne pouvez ni l’agrandir, ni la rétrécir, ni la condamner et ce n’est pas vous qui l'avez créée.
 
Quant au texte, c’est à nous de l’écrire. C’est notre attitude face à ce contexte et notre réponse à cette épreuve, qui constitue notre texte et nous ne vous laisserons jamais le dicter ! Car c’est notre choix et non pas le vôtre.
 
 
Pour retourner plus concrètement au terrain de l’invitation à Dieu :
 
Je me demande souvent, en voyant l’énergie, le temps investi, l’effort déployé, l’intelligence ou plutôt la ruse qui est mise ou entreprise, les alliances parfois les plus bizarres et les plus absurdes qui se construisent (comme celles entre des adeptes de la théorie de l’exclusivité du salut et des pérénialistes) pour silencier ou étouffer des petites voies qui ont choisi de chanter une mélodie un peu différente de ce qui se chante sur le marché, et tuer dans l’œuf des jeunes initiatives qui ont choisi d’apporter quelque chose de “nouveau”, ou plutôt de retourner à un classique encore plus classique : pourquoi tout cet acharnement et cette haine ? Pourquoi avoir si peur de l’autre, de ses idées, de ses projets ? Pourquoi vouloir l’abasourdir à tout prix et faire peur à ceux qui l’aiment ? Demandez-vous pourquoi cette crainte face à des opinions qui ne sont pas les vôtres ? Pourquoi toute cette panique, ce sentiment d’insécurité ? Il faudrait défendre Dieu ? Contre qui ? Qui serait si fort pour représenter un tel danger face à Dieu ? Et Dieu aurait besoin de nous pour défendre Sa Religion ? Si nous sentons la religion autant menacée, c’est peut-être parce que nous la sous-estimons finalement.
 
Laissez être et laissez naître, laissez vivre toutes les initiatives ! Vous allez me dire que c’est votre jihâd de plume pour sauver et servir la “religion authentique” du Dieu Unique ?
 
Je vous dirais : la Religion de Dieu n’est pas sous la tutelle de l’homme, c’est l’homme qui est sous la tutelle de Dieu. Le Dieu Authentique et Unique n’a besoin de personne pour défendre Sa Religion Authentique, à moins que vous parliez de votre dieu, ou de vos dieux. Là oui, s’il vous plaît, ils ont vraiment besoin de votre protection. Accourez à leur secours de toute votre force. Et dans leur religion, pour votre aise, la fin justifie les moyens, et tous les moyens sont bons pour parvenir à sauver leur trône. Dans ce cas-ci, je n’aurai rien à vous reprocher. Dans ce cas-ci allez-y : médisez, souillez l’honneur, divulguez les secrets cachés, manipulez, trahissez, mentez, descendez, montez. Libre à vous. C’est légitime dans votre religion, qui grâce à Dieu, n’est pas la mienne.
 
Vous allez me dire que vous voulez sauver les brebis de Dieu des loups charlatans ? Je vous dirais : pour l’Amour de Dieu et par amour aux brebis : rassemblez-les quelque part, donnez-leur à manger et à boire, et prenez soin d’elles ! Ce n’est pas un service que vous leur faites de les éparpiller encore plus en les affolant avec vos cris de panique, et en les faisant sortir de leurs refuges pour enfin ne rien leur offrir en alternatives, et les laisser souffrir.
 
Quant aux charlatans, la vérité je vous dis : la meilleure manière de combattre une fausse opinion, c’est de la laisser à l’épreuve du temps. Aucun charlatan ne survit à l’épreuve du temps, l’erreur finit toujours par retourner au néant. Et si l’héritage de quelques-uns de ces charlatans existe toujours, c’est grâce à ses détracteurs qui ont fait sa publicité, qui ont amené de l’eau à son moulin.
 
La vérité je vous dis : n’utilisez votre souffle que pour appuyer un message de vérité ou pour renforcer la flamme d’un feu béni. Il est inutile de souffler sur un feu maudit pour l’éteindre. Ça ne fera qu’augmenter sa flamme.
 
Alors je dis à mes frères encore une fois : laissez naître, laissez être et laissez vivre, et remettez à Dieu ce qui Lui appartient. Si certaines de ces voies aujourd’hui sont fausses, plus on paniquera face à elles, plus on se sentira menacé face à elles, plus on leur donnera de l’importance, du poids, de la valeur. Et peut-être que certaines de ces initiatives qui vous effraient aujourd’hui seront les alternatives qui permettront à vos enfants de trouver les réponses à leurs questionnements demain… Peut-être que cette voix que vous voulez faire taire aujourd’hui permettra à vos enfants de trouver le chemin vers Sa Voie demain.
 
 
"La Grâce de Dieu est comme la pluie qui tombe sur une terre fertile. Elle verra pousser des roses, de toutes les couleurs, comme elle verra pousser des ronces. Aucune de ces prises de vie ne peut être considérée comme une mauvaise réponse. Les roses comme les ronces sont des enfants légitimes de la Grâce de Dieu. Tout ce qui est enfant légitime de la Grâce de Dieu fait partie de Son Plan. L’attitude sage serait donc de le laisser naître, et de le laisser être."
 
 
Pour conclure, sur un ton plus soufi ou “zen”, je vous dirai : la Grâce de Dieu est fertile. Prétendre à l’exclusivité de la vérité est une sous-estimation de la Fertilité de la Grâce Divine. Cette Grâce Divine qui peut nous toucher, venir dans notre vie, sous la forme d’un Prophète, d’un guide spirituel, d’un enseignement, d’une inspiration, ne peut être que fertile. Et inévitablement elle fera naître plusieurs belles initiatives et donnera plusieurs bonnes réponses. La Grâce de Dieu est comme la pluie qui tombe sur une terre fertile. Elle verra pousser des roses, de toutes les couleurs, comme elle verra pousser des ronces. Aucune de ces prises de vie ne peut être considérée comme une mauvaise réponse. Les roses comme les ronces sont des enfants légitimes de la Grâce de Dieu, car c'est bien c'est la même descente de la Pluie Céleste qu'est la Grâce de Dieu, qui les amène à l'existence. Tout ce qui est enfant légitime de la Grâce de Dieu fait partie de Son Plan. L’attitude sage serait donc de le laisser naître, et de le laisser être.
 
Sauvez votre énergie pour construire des “vrais hommes de Dieu”, selon la compréhension, l’inspiration et les moyens que Dieu vous a donnés. Ce n’est pas une action vertueuse de gaspiller votre énergie pour détruire des gens que vous pensez être des “faux hommes de Dieu”. C’est à cause de cette volonté de combattre les faux christs que plusieurs vrais Christs et hommes de Dieu se sont trouvés sur le crucifix et sous la guillotine. Pensez-y.
 
Et rappelez-vous que ceux qui sortiraient pour combattre l’Antéchrist et son armée ne seront pas considérés comme martyrs, car le Prophète nous a défendu de lui faire face. Car il faut simplement le laisser naître, et le laisser être, tout en remplissant le cœur de la foi et de la certitude qu’il ne pourra dépasser les limites que Dieu lui a assignées.
 
Le texte, l’attitude et la réponse qui sont attendues de nous face à ce Plan de Dieu, c’est de rester calme et serein, de continuer notre chemin dans l’assurance de Dieu et la pleine confiance que tout est entre Ses Mains. La seule chose qu’on peut faire, si on cherche à “défendre la Religion”, c’est chercher le refuge dans la Patience active (Sabr), dans la Prière, dans le renforcement spirituel (Salât). Et devenir cet homme de Dieu, l’homme de son contexte (sahib al-waqt) qui saura lire le contexte actuel et le débarrasser de ses délires.
 
 

 
Texte du 11 Janvier 2022
 
* : "Israël" désigne en effet étymologiquement "celui qui voyage vers Dieu". À partir du verset 40 de la Sourate al-Baqarah, Dieu parle aux hommes en s'adressant à eux via les termes d' "Enfants d'Adam", puis par ceux d' "Enfants d'Israël". Une lecture de ces deux termes successifs est que l'humanité comme "enfant d'Adam" représente l'humanité idéale, l'idée de l'homme, l'essence de l'homme avant sa venue sur terre; et que les enfants d'Israël désignent quant à eux l'humanité dans sa dimension terrestre et historique.  Les enfants d'Israël mentionnés dans le Qor'an peuvent donc signifier à la fois la communauté historique que nous connaissons, mais aussi l'humanité totale dans sa dimension terrestre, une fois que l'homme est engagé dans ce monde-là, et qu'il doit retrouver son chemin pour retourner à Dieu. Vous pouvez retrouver cet enseignement détaillé à cette adresse : https://www.youtube.com/watch?v=alB7ROAtIxc&t=6s
 

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