La musique est-elle interdite en islam ? 

art développement personnel se développer en tant qu'être humain Jan 15, 2023
la musique est-elle interdite en islam

 

Il m’a été posé cette question : “Je suis tombé sur un prêche d’un imam français qui disait que la musique est interdite. Cela m’a un peu choqué, car j’aime la musique, et je trouve qu'une vie sans musique est une vie d’une grande pauvreté... Pourriez-vous m’éclairer sur ce sujet ?”. Nous allons voir dans cette réponse que la musique, comme tout art, fait partie intrinsèque de la condition et de l'expression humaines, et que, à ce titre, elle n'est pas interdite en elle-même. Cette opinion de l'interdiction est toujours restée minoritaire, et relève de l'extrémisme religieux qui s’amplifie et se propage particulièrement particulièrement lorsque l'identité religieuse semble attaquée. En revanche, le Prophète Mohammed nous a bien avertis sur le danger des sous-cultures néfastes et parfois même décadentes qui peuvent graviter autour de la musique, chose à laquelle nous devons porter attention. 

 

 

La musique n'est pas interdite en elle-même

Il s’agit en effet d’un malentendu qui a, de façon assez bizarre je dois dire, toujours ses échos de nos jours, mille cinq cent ans après le passage du Prophète Mohammed sur terre (que Dieu continue de nourrir son être, sa lumière, la force de son âme, son héritage spirituel et notre connexion à lui et à ses héritiers bénis). Force est de constater que malgré les fruits de la civilisation spirituelle islamique qui a donné naissance à tant de variétés de musiques et d’expressions artistiques en tout genre, cette opinion circule toujours. Elle n’a pourtant jamais fait l’unanimité et  n'a même jamais été acceptée par la majorité. 

Aujourd'hui, cet avis est porté et défendu par une secte en particulier, le genre de secte puritaine et rigoriste que l’on trouve dans toutes les religions en réalité et qui poussent l’interprétation des textes à un extrême. Leur but est souvent de renforcer l’identité religieuse dans un contexte où elle se voit menacée, ce qui passe par un appel à une rigueur dans la pratique religieuse.

Ainsi, comme la musique et les arts en général relèvent symboliquement du “féminin”, ce genre de courant pense que ces derniers peuvent inspirer faiblesse, mollesse, fainéantise, manque de rigueur et de virilité. C’est pour cela que les courants puritains, quels qu’ils soient, cherchent toujours à interdire la musique et le développement artistique en général.

Pourtant, force est de constater que partout où l’islam s’est implanté, il a donné naissance à une musique spirituelle belle et fertile. Il n’y a pas un seul village musulman qui n’a pas développé sa propre musique, ses propres chants, sa propre danse. L’art faisant partie de la condition humaine, c’est tout naturellement qu’on le trouve au cœur de l’expression d’une personne spirituellement épanouie. Nul besoin de théoriser ce fait, c’est évident en réalité. 

 

 

Découvrez un exemple de chant spirituel en visionnant cette vidéo Un vent de Rajab

 

  

Cependant, certains Amis de Dieu ont dû se pencher sur la question, comme l’Imam al-Ghazali par exemple, qui a dû répondre aux puritanistes rigoristes de son époque, qui juraient que la musique étaient interdite. Pour rappel, il vivait durant un temps où les musulmans étaient attaqués par les mongoles, attaques qui ont créé le terreau pour le développement de ce genre de courants. Ils ont affirmé que s’ils avaient été vaincus, c’était à cause de la décadence qui régnait dans la société islamique à ce moment-là. 

Le problème de ce genre de courants de pensée, qui ne sont pas des courants vivants mais de simples réactions nées de la panique ou de la colère, c’est qu’ils ne permettent pas la nuance, et qu’ils poussent au final à jeter le bébé avec l’eau du bain… Car si ce discours part d’une colère légitime et d’un constat malheureux, il se fait dans la réaction pure face à une crise, et non dans l’action réfléchie. Certes, il y avait bien une crise, mais est-ce que la musique et l'expression artistique en étaient la cause ?

L’Imam al-Ghazali a donc pris le temps d’étudier la question, et de comparer les différents styles de musique. Il est arrivé à la conclusion que la musique n’a rien de mauvais en soi, que c’est une expression humaine très naturelle. Il développe même l’idée que le goût pour le bon son, ou pour la belle voix, doit être développé, car la personne qui n’arrive pas à apprécier cette beauté est dans le même état que la personne qui n'apprécie pas la Beauté créée par Dieu qui l’entoure, comme celle du coucher de soleil par exemple. Selon lui et aussi selon d’autres savants et Amis de Dieu à travers les âges, cette personne n’est pas épanouie, il la considère comme “handicapée” sur le plan mental ou sentimental, et pense qu’elle a besoin d’une cure, thérapie. 

 

 

 

 

La sous-culture de décadence qui accompagne souvent la musique est elle interdite

Là où se trouve la nuance, c’est que, comme pour toute chose naturelle (comme la nourriture par exemple), elle peut être utilisée pour jouer son rôle de développement de conscience et de cultivation d’une personnalité saine, comme elle peut être mal utilisée pour endormir l’être humain et devenir une addiction, un outil d’inconscience. C’est là qu’il faut être prudent car, souvent, on ne peut que constater que la sous-culture qui accompagne la musique est très néfaste pour le développement d’une personnalité saine.

D’ailleurs, c’est ce qui est dit dans l’enseignement prophétique sur lequel les rigoristes s’appuient pour interdire la musique. En effet, dans ce texte isolé de son contexte, il est dit que le Prophète aurait dit : 

 

“Vers la fin des temps, il y aura des gens qui vont rendre l’illicite licite et qui vont autoriser “al -ma’azif”, ainsi que les chanteuses et les danseuses.”

 

Certains ont insisté pour traduire le terme “al-ma’azif” ici présent par “instruments de musique”, mais ce n’est pas ce terme qui est pourtant utilisé en arabe pour dire "instruments de musique”. A partir de ce récit, certains experts de la loi islamique, ont développé l’idée que certains types d’instruments pourraient être autorisés, et d’autres non : les instruments à corde entreraient dans “al-ma’azif”, mais pas les percussions… La flûte serait interdite aussi, selon certains… Mais ces opinions n’ont jamais fait l’unanimité et n’ont jamais pu vraiment sortir des écoles juridiques pour être appliquées dans la vie courante en réalité. Tout simplement car elles ont émané et évolué en contradiction totale avec la culture de la population qui a toujours pratiqué ses instruments de musique pour exprimer son art. 

En réalité, le terme “al-ma’azif” ne parle pas de tel ou tel instrument de musique mais il doit être mis en lien avec les termes qui viennent après : “danseuses et chanteuses”. Ce terme vient décrire la sous-culture qui naît souvent dans les milieux où on écoute la musique, l’ambiance et la décadence qui peut survenir si on ne reste pas dans une lutte active de développement de conscience et de cultivation de la force de Vie en nous et autour de nous.  

 

Merci pour votre question, que Dieu nous protège et nous donne le bon discernement !

 

Pour aller plus loin sur l'importance de la culture, lire notre article "Célébrer les demandes de pardon ?"

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